jeudi 11 octobre 2012

Il y a un an : Occupons Montréal


Le 15 octobre sera le premier anniversaire du mouvement mondial #Occupons. J'y ai milité une bonne partie de l'année et je suis heureux de voir aujourd'hui à quel point les personnes qui sont passées par Occupons Montréal sont encore motivées et agissent directement sur la réalité qui les entoure. Dans mon prochain billet, je ferai le recensement de toutes les initiatives en cours auxquelles ont contribué des anciens militants d'Occupons Montréal. Mais aujourd'hui, je vous livre un texte inédit que j'ai écrit le 28 mars 2012, à l'époque où il y avait encore des assemblées générales du mouvement. Ce qui me frappe, c'est à quel point ce texte est encore d'actualité en ce qui a trait aux rassemblements organisés par les citoyens en dehors des structures officielles que sont les partis politiques, les universités et les organismes sans but lucratif financés par le gouvernement et les entreprises privées.



Occupons Montréal et le mouvement des Indignés

Qu'est-ce que c'est?
Occupons Montréal est la manifestation locale d'un mouvement mondial de protection et de promotion de la dignité humaine communément appelé  le mouvement des Indignés.

Caractéristiques générales des rassemblements
Les rassemblements se tiennent dans des lieux publics.
Un rassemblement est appelé une «occupation» et s'organise de façon informelle pour combler les besoins en nourriture, en abris et pour favoriser les échanges entre les participants.
Chaque rassemblement organise des assemblées pour prendre les décisions qui ne peuvent pas être prises de façon informelle par les individus et les groupes d'affinités.

Principes d'organisation
Horizontalité : Il n'y a pas de hiérarchie officielle au sein du mouvement. L'importance est placée sur les relations humaines et le sentiment de communauté. Chacun est encouragé à prendre des initiatives et à faire preuve de jugement quand aux impacts de ses actions et de ses paroles sur les autres.

Diversité : Les rassemblements sont ouverts à tous sans discrimination de race, de sexe, d'âge, de richesse, de scolarité, de condition physique ou mentale. Les différences sont appréciées et respectées. Les conflits sont résolus par la parole et toujours dans l'optique de préserver la bonne entente de l'ensemble de la communauté.

Transparence : Chacun est encouragé à mettre plus de conscience dans ses paroles et dans ses gestes et à  communiquer ses intentions et ses sentiments. Les émotions sont respectées et protégées.

Cercles de parole
Un cercle de parole est une réunion d'individus qui prennent la parole à tour de rôle. Chacun est libre de se joindre ou de quitter un cercle de parole en cours. Un cercle de parole peut se concentrer sur un sujet précis ou bien être une discussion d'ordre général.

Groupes d'affinités
Un groupe d'affinité est formé d'individus qui se réunissent régulièrement pour discuter d'un sujet ou pour exercer une activité. Un groupe d'affinité est joignable et ses réunions sont annoncées à l'avance. Un groupe peut choisir de tenir des réunions ou de faire son activité dans un espace soumis à des règles acceptées par la communauté. Par exemple : des règles d'hygiène dans une cuisine, des règles comptables pour l'administration, des règles de facilitation pour une discussion. Lorsque des groupes d'affinités se forment dans le but d'exercer  une activité ou de préparer une proposition, ils sont encouragés à se coordonner avec les autres en participant au conseil des groupes.

Conseil des groupes
Le conseil des groupes est un espace d'information et de coordination. Les groupes nouvellement formés s'y font connaître. Les groupes actifs y présentent des comptes-rendus de leurs activités ou de leurs discussions. C'est l'endroit privilégié pour faire connaître une action en préparation et obtenir de l'aide logistique pour sa réalisation.

Assemblée générale
L'assemblée générale est un espace d'information et de prise de décision. On y fait le compte-rendu des derniers événements et on y annonce les actions à venir. Lorsque des décisions importantes doivent être prises concernant tout le rassemblement, c'est là qu'on fait des propositions sur lesquelles l'assemblée va se prononcer.

Comment participer?
La meilleure façon de participer à un rassemblement dépend du tempérament de chacun. On peut parler avec des participants et nouer des liens. On peut se joindre à un cercle de parole en cours. On peut aussi approcher quelqu'un qui exerce une activité qui nous intéresse et offrir de donner un coup de main. Au bout d'un certain temps, on se fait une idée des valeurs et du sentiment de communauté qui sont installés dans le rassemblement. On peut alors voir de quelle façon contribuer de façon plus personnelle selon les besoins que l'on perçoit.

Erreurs communes
On se trompe souvent sur le rôle de l'assemblée générale. Contrairement aux assemblées générales d'organismes politisés, l'assemblée générale d'une occupation n'est pas un espace où faire la promotion de points de vue particuliers. Entre autres, il est mal vu d'y prendre la parole pour défendre une idéologie. Pour qu'une proposition soit bien accueillie par l'assemblée, elle doit porter sur une question d'intérêt pour l'ensemble du rassemblement. En général, il est préférable d'interagir au niveau le plus près possible des individus, c'est-à-dire de parler d'abord de façon informelle avec des participants, soit individuellement ou dans des cercles de parole, et, s'il y a besoin, initier un nouveau cercle de parole ou un nouveau groupe d'affinité. En fait, il n'y a pas de règles strictes à suivre, mais en respectant l'usage des différents espaces, le temps de chacun est mieux utilisé pour le bien-être de tout le rassemblement.
Une erreur fréquente est de confondre écoute et assentiment. Une occupation est un espace favorable aux conversations. C'est extrêmement libérateur de sentir qu'on est écouté. Cependant, une écoute soutenue ne veut pas dire que la personne ou le groupe qui écoute est nécessairement d'accord avec ce qui est entendu. Une écoute véritable et respectueuse demande de ne pas réagir à tout propos. Prendre pour acquis l'assentiment de ceux qui écoutent mène régulièrement à des malentendus.

Questions fréquemment posées
Q Est-ce qu'il y a des organisateurs à qui je peux parler?            
R  Les participants à un rassemblement sont tous à des degrés divers des organisateurs et sont généralement bien disposés à parler pourvu qu'on les aborde avec courtoisie.

Q Est-ce qu'il y a un porte-parole à qui je peux parler?
R Les participants à un rassemblement ont tous leur perspective unique sur la nature et le fonctionnement du mouvement des Indignés et sur les occupations d'espaces publics. Ils sont généralement bien disposés à parler pourvu qu'on les aborde avec courtoisie.

Q Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut me donner une réponse officielle?
R Il n'y a pas d'autorité constituée qui peut parler au nom de tous les participants à un rassemblement. Il n'y a donc pas de fonction officielle qui puisse être assumée par un quelconque participant à un rassemblement. Chaque participant est libre de donner les réponses qu'il veut à propos du mouvement ou du rassemblement.

Q Qui peut me parler au nom du mouvement?
R Personne ne peut prétendre parler au nom du mouvement, pas plus qu'on ne peut parler au nom du mouvement des femmes ou au nom du mouvement des droits civiques.

Q Qui peut me parler au nom de l'occupation?
R Personne ne peut prétendre parler au nom du rassemblement, même si chacun est libre de donner son point de vue personnel.

Q Qui a décidé de l'organisation?
R L'organisation du campement du 15 octobre s'est faite par les gens qui s'y sont présentés. Même si un groupe d'initiateurs avait préparé des activités et des propositions au cours de rencontres préparatoires, il était impossible pour eux de savoir qui se présenterait et qui participerait au rassemblement. En général, les occupations se passent de la même façon, avec un petit groupe d'initiateurs pour appeler à la mobilisation et ensuite une organisation spontanée qui s'effectue sur place avec les individus présents, leurs compétences, leurs goûts et leurs énergies.

Q J'ai une solution pour régler les problèmes du monde actuel. À qui devrais-je parler?
R Félicitations! Prenez le temps de vous familiariser avec les participants au rassemblement et prenez le temps de les laisser se familiariser avec vous. Vous trouverez certainement une oreille attentive.

Q Je veux vous parler d'une activité importante à laquelle vous devez participer. D'accord?
R Excellent! Pour obtenir une bonne participation à cette activité, parlez-en à plusieurs personnes dans le rassemblement et prenez le temps d'écouter leurs conseils. Si l'accueil est mitigé, c'est peut-être qu'il faut retravailler la présentation de l'activité. Soyez conscient que la plupart des participants ont de l'aversion pour le marketing. Allez plutôt du côté de la clarté et de la vérité.

Q Est-ce que ça va changer quelque chose tout ça?
R Oui. Les mentalités ont déjà commencé à changer.


Pour avoir le point de vue de ma collègue Ève du Comité de philosophie politique d'Occupons Montréal : 


mis à jour 12 octobre 2012  8h36

mardi 2 octobre 2012

Pour en finir avec l'or


Le 1er octobre à RDI, Louis Boulanger expliquait que les lingots d'or et d'argent sont en train de remplacer les devises comme réserves de pouvoir d'achat. Les banques centrales en achètent de plus en plus en prévision de la révision éventuelle du système monétaire. Cette révision est rendue inévitable étant donné les dernières décennies de création monétaire abusive, la perte de confiance et les crises financières à répétition. Il réfère au livre Currency Wars[i] pour en apprendre plus. Notez bien qu'un livre du même titre et sur le même sujet a été publié en Chine quatre ans auparavant[ii].

Je comprends que d'un point de vue individuel  — pour ne pas dire individualiste — il est prudent d'acheter des lingots d'or comme réserve de pouvoir d'achat. Cependant, je suis persuadé que d'un point de vue collectif, un retour à l'or comme monnaie d'échange serait une aberration intolérable. On n'a qu'à regarder l'histoire de la monnaie pour comprendre que la thésaurisation de l'or dans une partie du monde conduit invariablement à la guerre lorsque ceux qui sont en pénurie de monnaie vont chercher par la force l'or accumulé dont ils pensent avoir besoin pour assurer la fluidité de leurs marchés. Je pèse mes mots : la valeur d'une monnaie d'échange ne doit pas être liée à une matière sous peine de causer des guerres et des souffrances humaines sans fin.

De plus, l'histoire récente nous apprend que l'extraction de l'or cause des dommages environnementaux dont nous ne tenons pas encore compte lors de l'évaluation du coût total d'une exploitation minière. Ces dommages sont de plus en plus important au fur et à mesure que la technologie nous permet de traiter des tonnes de terre avec des produits corrosifs pour en extraire des quantités infimes d'or. L'histoire nous montre également que ce sont les terres des plus faibles qui sont exploitées par les minières pour en tirer de l'or, notamment les populations autochtones qui vivent au même endroit depuis des millénaires.

Il existe plusieurs alternatives à une monnaie représentative fondée sur une matière ou un pouvoir de taxation. Personnellement, je privilégie mon modèle de monnaie fiduciaire. Il s'agit d'une monnaie centralisée dont la masse est liée à la population. En tenant compte des variations de population, la masse demeure constante et un mécanisme de redistribution objectif et automatique évite les thésaurisations excessive et les pénuries de monnaie qu'elles entraînent.

Avis aux intéressés : je vais parler plus en détail des failles du système actuel lors d'un atelier sur la création monétaire le 15 octobre prochain au square Victoria.


[i]  Currency Wars: The Making of the Next Global Crisis, James Rickards, 2011.
[ii] Currency Wars (货币战) , Song Hongbing, 2007,