lundi 23 septembre 2013

Indignations : un récit photographique

Un de mes sujets de réflexion récurrents est la nature du « récit ». La construction de récits est-elle essentielle pour comprendre le réel? Un choix de photos peut-il communiquer une compréhension individuelle de la réalité d'une histoire partagée? C'est ce que je tente de faire d'aujourd'hui avec la sélection suivante de photographies que j'ai prises lors d'événements auxquels j'ai participé en 2012 et 2013.
























La fin? Non.

vendredi 20 septembre 2013

15, rue de la Dignité

Article écrit par François Genest le 2 août 2013 et publié dans la Cité d'Athéna le 20 septembre 2013. Reproduction du texte autorisée. Permission requise pour les photos [à venir, peut-être].

L’automne prochain verra le deuxième anniversaire du mouvement du 15 octobre. On se souviendra qu’en 2011, dans la foulée des soulèvements populaires des pays arabes et inspirées par les rassemblements autogérés des Indignados espagnols, des milliers de personnes ont choisi de montrer leur solidarité avec un campement établi à Zuchotti Park — une action directe et non violente dont les participants avaient maille à partir avec les autorités — en formant elles-mêmes des occupations à travers le monde.  Le campement autogéré de New York, établi le 17 septembre 2011, reçut le surnom «Occupy Wall Street» de la publicité éponyme du magazine Adbusters. Le mouvement du 15 octobre donna naissance à une multitude d’occupations d’espaces publics, chacune reprenant le nom «Occupy» suivi du nom de la ville où se situait l’action.

Le 15 octobre 2011, je me rappelle m’être rendu sur le site du campement «Occupons Montréal», plutôt sceptique quant à l’efficacité de ce moyen d’action. C’est au cours de la première assemblée générale que le square Victoria fut rebaptisé : «Place du peuple». J’ai d’abord cru qu’il y avait des organisateurs ayant un plan d’action bien défini, mais non divulgué. Puis, voyant que les occupants tenaient bon après plusieurs jours, je me suis impliqué dans un comité, histoire de voir si je pouvais apporter mon aide autrement qu’en faisant un don. Très rapidement, je me suis rendu compte qu’il n’y avait à peu près rien de planifié et que ceux qui faisaient des choses  bien visibles comme de nourrir les gens et d’animer des assemblées — et donc susceptibles d’être des meneurs inavoués — apprenaient ce qu’ils faisaient au fur et à mesure, tout en le faisant.

Tel qu’affiché, il s’agissait bel et bien d’un «territoire autogéré», au vu et au su de tous les passants du quartier des affaires. Pour leurs idées, les occupants s’inspiraient des connaissances partagées — celles-ci en assemblée formelle,  celles-là en s’activant ou dans un moment de détente — et des expériences vécues en commun face à l’adversité.

C’est donc en m’impliquant que je suis devenu un observateur critique du mouvement, comme tant d’autres participants — tous, peut-être. Plusieurs ont constaté que les campements connaissaient des problèmes semblables à ceux de Zuchotti Park, selon une progression en accord avec l’âge des occupations.

Il est clair pour moi que l’histoire du mouvement Occupy est riche en enseignements sur l’auto-organisation sociale.

Cette histoire est-elle terminée? Ça dépend à qui vous posez la question. Si vous avez observé le mouvement de loin, vous l’avez vu disparaître en même temps que ses manifestations visibles. Toutefois, pour peu qu’on pose la question à celles et à ceux qui sont passés par les campements, il existe une multiplicité de perceptions quant à la teneur des événements depuis le 15 octobre 2011.

Une question plus intéressante, maintes fois posée dans les discussions du mouvement, est la suivante : «Qu’est-ce qui vient après l’indignation?» Lorsque les Indignés sont rassemblés autour d’une vision commune sur les causes des problèmes économiques, politiques et environnementaux, comment peuvent-ils y remédier? Des centaines de personnes sont venues aux assemblées proposer des solutions, chacune attendant patiemment son tour pour les offrir au mouvement. Si rien de spectaculaire n’en est  issu, je me rends compte aujourd’hui que cette générosité en soi est déjà une réponse.

Je ne pourrai pas être à la place du Peuple le 15 octobre prochain — je serai occupé ailleurs — mais ce n’est que partie remise : je reste profondément attaché aux autres participants du mouvement. Pour moi, l’histoire se poursuit dans de petites actions concrètes, au fil des rencontres avec les autres promeneurs qui arpentent, comme nous, la rue de la Dignité.