samedi 19 septembre 2015

Pour une science sociale bien fondée

Toute science digne de ce nom doit être bien fondée en logique. C'est le cas pour les sciences naturelles qui ont place dans nos universités depuis la Renaissance. Ce sont les avancées spectaculaires en physique, en chimie, en biologie qui ont inspiré les philosophes de la modernité à appliquer la méthode scientifique à l'étude des choses humaines, remettant en question jusqu'aux croyances les plus intimes des êtres humains. C'est ainsi qu'on a vu l'émergence de l'économie politique, de la sociologie, de la science politique, soit des disciplines universitaires qui ont modifié l'organisation humaine de par leur seule existence. Ceci démontre l'intérêt de ces sujets, mais met en même temps en évidence un problème de fondement. Les théories de Thomas Hobbes, Karl Marx, Max Weber par exemple, ont donné une base à des phénomènes humains concrets qui influencent toujours le cours des choses humaines. Si le fait d'énoncer une théorie objective modifie l'objet d'étude, est-on réellement en terrain scientifique? Il y  a là un paradoxe qu'on ne peut pas éluder si on prétend fonder une science sociale.

Portrait d'Auguste Comte, philosophe des sciences

Le mouvement structuraliste a tenté de contourner la question en se limitant aux formes sans se prononcer sur le fond. Nous vivons présentement à une époque où toutes les sciences suscitent le doute sur leur bien-fondé, y compris les sciences naturelles, notamment l'écologie. Pourtant, les changements climatiques sont devenus indéniables, et nous avons besoin plus que jamais d'appliquer la raison scientifique aux choses humaines, si on veut y voir clair et mitiger les dégâts.

Que l'on parle d'économie, de société ou de gouvernement, il y a toujours présente la notion d'ensemble et c'est utile de remarquer que la théorie des ensembles est une discipline mathématique qui a connu une crise majeure au tournant du XXème siècle. En guise d'illustration[1], considérons l'énoncé suivant :
L'ensemble de tous les ensembles qui ne se contiennent pas eux-mêmes ne se contient pas lui-même.
C'est un paradoxe, car l'énoncé ne peut être ni vrai ni faux sans qu'il y ait dans tous les cas une contradiction. En dépit de l'existence de paradoxes comme celui-là, la théorie des ensembles était si riche qu'on ne pouvait pas la rejeter en bloc. Il fallait donc la refonder en logique, ce qui a été mené à bien et a même ouvert la voie à l'informatique. Il faut désormais distinguer entre la notion intuitive d'ensemble, celle employée dans l'énoncé ci-haut et non scientifique, et la notion logique, mathématique, qui, elle, ne génère pas d'énoncés paradoxaux.

Qu'est-ce qu'un marché? une culture? un État? Je prétends que les notions intuitives qui s'y rapportent ne sont pas scientifiques et qu'un examen sérieux des fondements s'impose si on veut en tirer des connaissances véritables.